13 — Sagesse Juridique  14 — Sagesse Juridique

Maîtrisez l’AUOHCCA (ou Acte Uniforme Comptable OHADA) et le SYSCOHADA 2017. Le guide ultime des principes de régularité, sincérité, et des trois systèmes comptables (Normal, Allégé, Minimal).

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Chers professionnels de la finance, experts-comptables, auditeurs et entrepreneurs, vous tenez entre vos mains le socle de la normalisation financière des affaires en Afrique : l’Acte Uniforme portant Organisation et Harmonisation des Comptabilités des entreprises sises dans les États-parties au Traité relatif à l’Harmonisation du Droit des Affaires en Afrique (AUOHCCA).

Ce document, annexé au Système Comptable OHADA (SYSCOHADA) , est le garant de la fiabilité, de la compréhension et de la comparabilité des informations financières sur un territoire qui représente plus de 200 millions de consommateurs.

Si le lien pour télécharger l’Acte Uniforme Comptable OHADA en PDF est évidemment disponible ci-dessous, la lecture de cette analyse est essentielle. La comptabilité n’est pas une simple obligation légale ; c’est un outil de pilotage stratégique et de confiance pour les investisseurs. Comprendre l’AUOHCCA, c’est comprendre comment valoriser votre entreprise, sécuriser sa gestion et attirer les capitaux.

I. Le Fondement de la Normalisation : Philosophie et Champ d’Application (Art. 1 à 6)

L’AUOHCCA poursuit un objectif fondamental : imposer à toute entreprise une comptabilité destinée tant à l’

information externe qu’à son propre usage.

1. Les Obligations Cardinales de l’Entreprise

Toute entreprise doit classer, saisir, et enregistrer toutes les opérations entraînant des mouvements de valeur, qu’elles soient traitées avec des tiers ou effectuées dans le cadre de sa gestion interne.

L’article 3 pose les trois piliers éthiques et techniques de toute comptabilité OHADA:

  • Régularité : Respect des règles et procédures comptables en vigueur.
  • Sincérité : Application des règles de bonne foi et appréciation raisonnable des événements.
  • Transparence : Clarté de la présentation pour ne pas dissimuler la réalité.

Le respect de ces trois principes, conjugué à la règle de prudence , est censé garantir l’image fidèle du patrimoine, de la situation financière et du résultat de l’entreprise.

2. Qui est Assujetti à l’AUOHCCA ?

L’article 2 a un champ d’application volontairement très large:

  • Les entreprises soumises au Droit commercial.
  • Les entreprises publiques et parapubliques, d’économie mixte.
  • Les sociétés coopératives.
  • Et, plus généralement, toutes les entités produisant des biens et services marchands ou non marchands qui exercent des activités économiques répétitives, qu’elles aient un but lucratif ou non.
Lire :
Télécharger l'Acte Uniforme Sûretés OHADA (AUOS 2010) PDF

Seules exceptions notables : les banques, les établissements financiers, les assurances, qui sont assujettis à des plans comptables spécifiques , et les entités soumises aux règles de la comptabilité publique.

II. Le Triptyque Systémique : Les Trois Niveaux de Comptabilité (Art. 11 et 13)

L’AUOHCCA reconnaît l’hétérogénéité du tissu économique africain et propose une architecture modulaire basée sur la taille de l’entreprise, principalement appréciée selon le chiffre d’affaires.

1. Le Système Normal : La Référence Complète (Art. 11, 26)

C’est le système par défaut auquel est soumise toute entreprise, sauf exception liée à sa taille. Il requiert la production de quatre états financiers annuels indissociables:

  1. Le Bilan.
  2. Le Compte de Résultat.
  3. Le Tableau Financier des Ressources et des Emplois (TAFIRE).
  4. L’État Annexé (ou Notes annexes).

De plus, il exige l’établissement d’un État supplémentaire statistique. Le TAFIRE est un outil essentiel pour analyser les flux de financement et d’investissement, bien plus que l’ancien Tableau de Financement.

2. Le Système Allégé : La Simplification (Art. 11, 27)

Le Système Allégé est accessible aux entreprises dont le chiffre d’affaires annuel ne dépasse pas 100 000 000 F CFA (cent millions). Il simplifie la production des états en ne rendant obligatoire que:

  1. Le Bilan (simplifié).
  2. Le Compte de Résultat (simplifié).
  3. L’État Annexé (simplifié).

Le TAFIRE et l’État supplémentaire statistique ne sont pas exigés dans ce régime, allégeant significativement la charge administrative pour les PME.

3. Le Système Minimal de Trésorerie (SMT) : Pour les Très Petites Entreprises (Art. 13, 28)

Ce régime dérogatoire est destiné aux très petites entreprises (TPE), dont les seuils de recettes annuelles sont très bas:

  • 30 millions de F CFA pour les entreprises de négoce.
  • 20 millions de F CFA pour les entreprises artisanales et assimilées.
  • 10 millions de F CFA pour les entreprises de services.

Ces entités tiennent une simple comptabilité de trésorerie et produisent un état des recettes et des dépenses. Néanmoins, l’AUOHCCA exige qu’elles tiennent compte, si significatifs, des variations de stocks, des créances/dettes commerciales, des équipements/emprunts et du capital apporté pour le calcul du résultat et la situation patrimoniale.

III. L’Architecture des États Financiers Annuels (Art. 25 à 34)

Les états financiers annuels doivent être arrêtés au plus tard dans les quatre mois suivant la date de clôture de l’exercice. Leur présentation est hautement normalisée.

1. Le Bilan (Art. 30)

Le Bilan décrit le patrimoine. Il est présenté en distinguant clairement les postes d’actif et de passif selon la nature des activités:

  • Actif : Actif Immobilisé, Actif d’Exploitation (Activités Ordinaires), Actif Hors Activités Ordinaires (HAO), Actif de Trésorerie.
  • Passif : Capitaux Propres et Ressources Assimilées, Dettes Financières, Passif d’Exploitation (Activités Ordinaires), Passif Hors Activités Ordinaires (HAO), Passif de Trésorerie.

Cette distinction entre Activité Ordinaire (AO) et Hors Activités Ordinaires (HAO) est fondamentale pour évaluer la performance récurrente de l’entreprise, en isolant les éléments exceptionnels.

Lire :
Télécharger la Loi n°2003-008 du 10 juillet 2003 au Cameroun

2. Le Compte de Résultat (Art. 31)

Le Compte de Résultat récapitule les produits et les charges pour dégager le bénéfice ou la perte nette. Il adopte une présentation en liste (par nature) et permet de calculer des soldes de gestion intermédiaires (comme la Valeur Ajoutée ou l’Excédent Brut d’Exploitation).

Comme pour le Bilan, la distinction AO/HAO est cruciale pour une lecture analytique et une évaluation de la qualité du résultat.

3. Le Tableau Financier des Ressources et des Emplois (TAFIRE) (Art. 32)

Cet état est unique au système et retrace les flux d’investissement, de financement et les flux de trésorerie. Il est vital pour évaluer la santé structurelle de l’entreprise, sa capacité à générer de la trésorerie et à financer sa croissance.

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4. L’État Annexé (Art. 33)

L’État Annexé est l’endroit où le juge comptable et l’investisseur trouvent la justification et le détail de ce qui est présenté dans les autres états. Il doit comporter tous les éléments significatifs susceptibles d’influencer le jugement des destinataires sur la situation de l’entreprise. Il est aussi le lieu où sont signalées toutes les modifications de présentation ou de méthodes d’évaluation.

5. Les Règles de Présentation et de Permanence (Art. 34)

L’AUOHCCA insiste sur la comparabilité des états financiers. Ainsi:

  • Le Bilan d’ouverture doit correspondre à celui de clôture de l’exercice précédent.
  • La permanence des méthodes est exigée d’un exercice à l’autre.
  • La compensation entre postes d’actif/passif et charges/produits est interdite (sauf fondement juridique).
  • Chaque poste doit indiquer le chiffre correspondant de l’exercice précédent (comparaison N/N-1).

IV. Les Règles d’Évaluation et de Détermination du Résultat (Art. 35 et s.)

L’harmonisation passe inévitablement par l’unification des règles d’évaluation.

1. Le Principe du Coût Historique (Art. 35 et 36)

L’évaluation est fondée sur la convention du coût historique, conjuguée aux principes de prudence et de continuité de l’exploitation. Le coût d’entrée d’un bien à l’actif est son coût réel d’acquisition (prix d’achat + charges rattachables) ou son coût réel de production (coût d’acquisition des matières + charges directes et indirectes rattachables).

Le principe de continuité de l’exploitation (going concern) est la règle. Ce n’est qu’en cas de liquidation ou de réduction sensible de l’activité que l’évaluation des biens doit être reconsidérée (valeur de liquidation).

2. L’Évaluation à l’Inventaire : L’Application de la Prudence (Art. 42, 43)

À la clôture, l’entreprise doit procéder à l’évaluation de ses biens, créances et dettes à leur valeur effective du moment, appelée valeur actuelle.

Cette valeur d’inventaire est comparée à la valeur d’entrée (coût historique):

  • Si la Valeur d’Inventaire est supérieure au Coût d’Entrée : la règle de prudence (et le principe du coût historique) l’emporte, la valeur d’entrée est maintenue.
  • Si la Valeur d’Inventaire est inférieure au Coût d’Entrée : la dépréciation doit être constatée.

Cette dépréciation est constatée sous deux formes:

  1. Amortissement : si la dépréciation est jugée certaine et irréversible (usure, obsolescence).
  2. Provision : si la dépréciation est jugée seulement probable et non irréversible (dépréciation temporaire). Le SYSCOHADA permet la réévaluation des éléments dans des conditions fixées par les autorités compétentes.

3. L’Amortissement (Art. 45)

L’amortissement est une constatation obligatoire. Il s’agit de répartir le coût du bien sur sa durée probable d’utilisation selon un plan prédéfini. Le coût amortissable est la différence entre le coût d’entrée et la valeur résiduelle prévisionnelle.

L’AUOHCCA exige la révision du plan d’amortissement en cours d’exécution si un changement significatif intervient dans l’environnement (juridique, technique, économique) ou dans les conditions d’utilisation du bien.

V. L’Organisation Comptable, la Preuve et les Comptes de Groupe (Titres I et II)

1. L’Organisation et la Sécurité Comptable (Art. 22)

L’Acte Uniforme est particulièrement rigoureux sur la tenue de la comptabilité, notamment lorsque celle-ci est informatisée. Le système doit garantir la régularité et la sécurité:

  • Irréversibilité : Le système de traitement doit interdire toute suppression, addition ou modification ultérieure de l’enregistrement.
  • Validation : Toute donnée doit être validée pour garantir son caractère définitif.
  • Clôture : Une procédure de clôture informatique doit être effectuée au moins trimestriellement pour figer la chronologie des opérations.
  • Chemin de Révision : L’organisation doit permettre la reconstitution ou la restitution du chemin de révision (traçabilité) pour le contrôle.

2. La Valeur Probante des Documents (Art. 67 et s.)

L’AUOHCCA confère aux documents comptables une valeur probante dans les États parties, sous réserve de respecter les règles de régularité et de sécurité. Les livres comptables et les pièces justificatives doivent être conservés pendant dix ans.

3. Les Comptes Consolidés et Combinés (Titre II)

Face au développement des groupes d’entreprises, l’AUOHCCA impose, sous certaines conditions de taille, l’établissement de comptes consolidés et/ou de comptes combinés.

  • Comptes Consolidés : Ils visent à présenter le patrimoine, la situation financière et le résultat d’un groupe d’entreprises comme s’il s’agissait d’une entité unique. L’AUOHCCA précise les méthodes de consolidation (intégration globale, proportionnelle, mise en équivalence).
  • Comptes Combinés : Ils sont requis pour les entités non liées par un lien de capital (pas de contrôle) mais relevant d’un même centre de décision ou de gestion (ex: réseau de franchises, succursales d’une même personne physique). Ils permettent une vision économique globale.

Conclusion : La Norme au Service du Développement

L’Acte Uniforme portant Organisation et Harmonisation des Comptabilités des entreprises (AUOHCCA) est bien plus qu’un recueil de règles. Il est l’instrument qui permet aux entreprises africaines de parler le même langage de confiance avec leurs partenaires, leurs banquiers et les investisseurs internationaux.

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Lire :
Décryptage de l'Acte Uniforme sur la Médiation OHADA (AUM 2017)

En imposant la régularité, la sincérité et la transparence, et en s’adaptant à la diversité des tailles d’entreprises (Système Normal, Allégé, SMT), l’OHADA a créé un environnement propice à la croissance, à l’attractivité des capitaux et à la bonne gouvernance. Maîtriser l’AUOHCCA, c’est se doter de la boussole pour naviguer avec succès dans l’espace économique harmonisé.

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