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Niveau : Cycle de Licence – 2ᵉ année académique
Réalisé par : FOGANG YANICK (Juriste diplômé en Sciences juridiques et politiques. Titulaire d’une maîtrise en Droit des affaires, et d’un Master en Droits de l’homme-Droit Pénal International-Droit International Humanitaire). « Université de Dschang »
TABLE DES MATIÈRES
INTRODUCTION GÉNÉRALE ………………………………………………………………………
• Émergence historique de la sociologie ………………………………………………….
• Objet fondamental de la discipline ………………………………………………………..
• Sources plurielles de la sociologie ……………………………………………………….
• Problématique centrale ………………………………………………………………………
• Intérêt théorique et pratique ……………………………………………………………….
• Défis contemporains ………………………………………………………………………….
• Enjeux épistémologiques et politiques ………………………………………………….
• Méthode et finalité de la sociologie ………………………………………………………I. LE MOYEN ÂGE DE LA SOCIOLOGIE : LES FONDEMENTS PHILOSOPHIQUES ..
A. PLATON (428-347 AV. J.-C.) : LA CITÉ IDÉALE ET LA SPÉCIALISATION FONCTIONNELLE ……………………………………………………………………………………….
B. ARISTOTE (384-322 AV. J.-C.) : LA SOCIÉTÉ COMME PHÉNOMÈNE NATUREL ..
C. SAINT AUGUSTIN (354-430) : LE DUALISME DE LA CITÉ TERRESTRE ET DE LA CITÉ CÉLESTE …………………………………………………………………………………..II. LES PRÉCURSEURS DE LA SOCIOLOGIE : LA RUPTURE AVEC LA SPÉCULATION …………………………………………………………………………………………..
A. JEAN-JACQUES ROUSSEAU (1712-1778) : LE CONTRAT SOCIAL ET LA VOLONTÉ GÉNÉRALE ………………………………………………………………………………..
B. MONTESQUIEU (1689-1755) : L’ESPRIT DES LOIS ET LA SÉPARATION DES POUVOIRS …………………………………………………………………………………………..
C. ALEXIS DE TOCQUEVILLE (1805-1859) : LA DÉMOCRATIE ET L’ÉGALITÉ DES CONDITIONS ……………………………………………………………………………………….
D. AUGUSTE COMTE (1798-1857) : LE POSITIVISME ET LA « PHYSIQUE SOCIALE » ..
E. SAINT-SIMON (1760-1825) : L’ÈRE DES PRODUCTEURS ET L’ORGANISATION SCIENTIFIQUE …………………………………………………………………………………….III. LES FONDATEURS DE LA SOCIOLOGIE : LA TRADITION CLASSIQUE ………..
A. KARL MARX (1818-1883) : LA LUTTE DES CLASSES ET LA CRITIQUE DU CAPITALISME ……………………………………………………………………………………….
B. ÉMILE DURKHEIM (1858-1917) : LE FAIT SOCIAL ET LA COHÉSION …………….
C. MAX WEBER (1864-1920) : L’ACTION SOCIALE ET LA RATIONALISATION …….IV. L’ESSOR DES SOCIOLOGIES NATIONALES : SPÉCIFICITÉS ET APPORTS ……
A. EN GRANDE-BRETAGNE : L’ORGANICISME ET LE FONCTIONNALISME …………
B. EN ITALIE : LA THÉORIE DES ÉLITES …………………………………………………….
C. EN FRANCE : L’INSTITUTIONNALISATION DE LA DISCIPLINE ……………………..
D. EN ALLEMAGNE : LA DIVERSITÉ DES HORIZONS …………………………………….
E. AUX ÉTATS-UNIS : LE PRAGMATISME ET L’INTERACTIONNISME SYMBO ………V. LE CONTEXTE AFRICAIN : ÉMERGENCE D’UNE VOIX AUTONOME …………….
A. ÉMERGENCE ET ENJEUX D’UNE SOCIOLOGIE AFRICAINE …………………………
B. PRINCIPAUX CONTRIBUTEURS ET PERSPECTIVES ………………………………….BIBLIOGRAPHIE INDICATIVE …………………………………………………………………..
I. OUVRAGES ……………………………………………………………………………………….
II. THÈSES ET MÉMOIRES ………………………………………………………………………
III. ARTICLES DE DOCTRINE …………………………………………………………………..
IV. TEXTES JURIDIQUES …………………………………………………………………………
V. AUTRES DOCUMENTS ……………………………………………………………………….
INTRODUCTION GÉNÉRALE
La sociologie générale, en tant que discipline académique autonome, est le fruit d’une longue maturation intellectuelle qui a vu la pensée sociale s’émanciper progressivement de la philosophie spéculative et de la théologie pour revendiquer un statut scientifique. Son émergence au XIXe siècle est inextricablement liée aux profonds bouleversements induits par les révolutions industrielle et politique en Europe.
L’objet fondamental de cette science est l’étude méthodique des faits sociaux, ces manières d’agir, de penser et de sentir qui est extérieures à l’individu et dotées d’un pouvoir de coercition qui s’impose à lui.
Ce cours retrace l’évolution historique de cette discipline, depuis ses prémisses dans la philosophie antique jusqu’à son institutionnalisation et sa diversification en courants théoriques et en traditions nationales distinctes.
Il explore les sources plurielles de la sociologie, qui puise tant dans la philosophie politique de Platon et d’Aristote, que dans la pensée théologique de Saint Augustin, les théories du contrat social des Lumières et le modèle épistémologique des sciences naturelles.
La problématique centrale qui traverse cette histoire intellectuelle est la tension dialectique entre, d’une part, une approche holiste ou macrosociologique, qui privilégie l’explication des phénomènes par les structures sociales (Durkheim, Marx), et d’autre part, une approche individualiste ou compréhensive, qui insiste sur le sens que les acteurs individuels donnent à leurs actions (Weber). Cette tension se retrouve dans le débat entre déterminisme social et capacité d’agir (agency) des individus.
L’intérêt théorique de la sociologie réside dans sa capacité à fournir des grilles de lecture et des concepts (anomie, lutte des classes, action sociale, etc.) pour analyser la structure, le fonctionnement et la transformation des sociétés. Son intérêt pratique, particulièrement dans le contexte camerounais, est considérable. Elle éclaire les enjeux des politiques publiques, des réformes institutionnelles, des processus de développement et des dynamiques identitaires dans un monde globalisé. Par exemple, comprendre la sociologie des organisations permet de mieux appréhender les résistances au changement dans l’administration publique camerounaise.
Les défis contemporains de la discipline sont multiples : la pluridisciplinarité, face à l’essor des cultural studies et des sciences cognitives ; la globalisation, qui remet en cause le cadre de l’État-nation comme périmètre d’analyse privilégié ; et la décolonisation des savoirs, qui invite à une relecture critique des canons théoriques occidentaux et à la promotion des épistémès du Sud.
Ses enjeux sont à la fois épistémologiques (comment produire une science objective du social sans nier la subjectivité des acteurs ?) et politiques (quelle place pour les sociologies non occidentales dans le paysage intellectuel mondial ?).
La méthode sociologique, hybride, combine l’observation rigoureuse, la comparaison systématique et l’interprétation compréhensive, avec une finalité qui est à la fois d’expliquer causalement les phénomènes collectifs et de comprendre le vécu des individus.
Ce résumé se propose de restituer l’essentiel du cours en articulant de manière systématique l’histoire des idées sociologiques avec des illustrations contemporaines, notamment puisées dans le contexte socio-politique camerounais, afin d’en dégager toute la pertinence opérationnelle pour le juriste et le politiste.
- LE MOYEN ÂGE DE LA SOCIOLOGIE : LES FONDEMENTS PHILOSOPHIQUES
Avant son autonomisation au XIXe siècle, la réflexion sur la société et son ordre était l’apanage de la philosophie et de la théologie. Cette période, qualifiée de « Moyen Âge » de la sociologie, a posé des questions fondamentales sur la justice, le pouvoir et la nature de la vie collective.
A. Platon (428-347 av. J.-C.) : La Cité Idéale et la Spécialisation Fonctionnelle
Dans La République et Les Lois, Platon élabore une conception idéaliste et normative de la société. Pour lui, la cité juste est celle où règne une harmonie fondée sur une stricte division du travail et une spécialisation fonctionnelle des groupes sociaux. Il distingue trois classes :
- Les producteurs (artisans, agriculteurs), chargés de la subsistance matérielle ;
- Les guerriers (auxiliaires), dédiés à la défense ;
- Les gouvernants (philosophes-rois), seuls capables d’accéder à la Vérité et d’exercer le pouvoir avec sagesse.
Cette séparation rigide vise à éviter la confusion des rôles, source de désordre et d’injustice, que Platon observe dans les régimes décadents comme la démocratie athénienne.
Exemple : Le principe de la séparation des pouvoirs (exécutif, législatif, judiciaire), pierre angulaire des démocraties modernes comme le Cameroun, est un héritage direct de cette pensée. Chaque pouvoir a une fonction spécifique et doit rester dans son domaine de compétence pour prévenir l’arbitraire et la tyrannie. La révision constitutionnelle est l’occasion de rééquilibrer ces pouvoirs.
B. Aristote (384-322 av. J.-C.) : La Société comme Phénomène Naturel
Disciple critique de Platon, Aristote, dans sa Politique, aborde la société non comme une construction idéale, mais comme un phénomène naturel. L’homme est un « animal politique » (zoon politikon) destiné par nature à vivre en communauté. Il analyse la société comme un agrégat de communautés élémentaires (famille, village) qui convergent naturellement vers la cité, forme achevée de l’association humaine. Sa pensée justifie les inégalités sociales, notamment l’esclavage, qu’il considère comme naturel, certains hommes étant « par nature » destinés à commander et d’autres à obéir.
Exemple : Certains discours contemporains sur les « élites naturelles » ou la « méritocratie » reprennent, souvent implicitement, l’idée aristotélicienne d’une hiérarchie socialement justifiée par des différences de talent ou de compétence. Au Cameroun, le débat sur l’accès aux grandes écoles et la reproduction des élites interroge cette notion de « naturel ».
C. Saint Augustin (354-430) : Le Dualisme de la Cité Terrestre et de la Cité Céleste
Dans La Cité de Dieu, Saint Augustin propose une vision théocentrique et dualiste de la société. Il oppose la Cité terrestre, caractérisée par le péché, l’amour de soi et la violence, à la Cité céleste, fondée sur l’amour de Dieu et promise au salut. Toute société humaine est un mélange de ces deux cités. Cette conception a eu une influence durable, en postulant l’origine divine de l’ordre social et en décourageant la recherche de fondements purement humains et profanes à la vie en société. L’Église a utilisé cette vision pour exiger la soumission aux autorités temporelles, aussi injustes fussent-elles.
Exemple : Les tensions récurrentes dans plusieurs pays, dont le Cameroun, entre le droit étatique et le droit religieux (coutumier ou canonique) trouvent un écho dans ce dualisme. Les débats sur le statut de la femme, l’héritage ou la laïcité de l’État sont souvent traversés par cette opposition entre un ordre social « humain » et un ordre présenté comme « divin ».
- LES PRÉCURSEURS DE LA SOCIOLOGIE : LA RUPTURE AVEC LA SPÉCULATION
Aux XVIIe et XVIIIe siècles, des penseurs opèrent une rupture décisive en cherchant à fonder l’ordre social non plus sur la nature ou Dieu, mais sur la raison et des mécanismes humains.
A. Jean-Jacques Rousseau (1712-1778) : Le Contrat Social et la Volonté Générale
Dans Du Contrat Social, Rousseau théorise le passage de l’état de nature à l’état civil par un pacte fondateur. Contre Hobbes, il voit l’état de nature comme un état de bonté et de paix relative. L’introduction de la propriété privée est l’acte fondateur de l’inégalité et de la société civile. Le contrat social juste est celui où chaque individu, en se donnant à tous, ne se donne à personne. Il aliène ses droits naturels au profit de la communauté et retrouve ses droits sous la forme de droits civils, garantis par la volonté générale, expression de l’intérêt commun et non simple somme des volontés particulières. Lire la suite…
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